Plus de la moitié de la population marocaine (53,2%) présente un trouble mental léger, moyen ou grave, d’après une étude supervisée par Nadia Kadiri, professeur de psychiatrie et praticienne au CHU Ibn Rochd à Casablanca, et publiée dans une revue scientifique.
L’enquête a concerné un échantillon représentatif de 6.000 personnes âgées de 15 ans ou plus des deux sexes, tirés au sort au niveau des provinces et préfectures du Maroc.
Il en ressort que les Marocains sont de plus en plus dépressifs avec une prévalence de 26,5%. Ce sont les femmes en milieu urbain qui sont les plus concernées, d’après les résultats de l’étude.
Un trouble anxieux au moins a été retrouvé chez 37% des personnes sondées.
Les troubles liés à l’alcool et aux substances addictives sont plus fréquents chez les hommes.
D’autres pays enregistrent de meilleurs scores. La prévalence du trouble dépressif majeur était de 36% à Alger, 19% à Nouakchott et 11% en France métropolitaine.
La prévalence de la totalité des troubles anxieux est de 42% à Alger, 22% en France et 20% à Nouakchott.
Cependant, l’offre est très faible par rapport à l’énorme demande de la population. Avec 350 psychiatres et 1.900 lits, le secteur ne répond pas aux normes de l’OMS qui recommande entre 5 et 8 lits pour 10.000 habitants.
«
Il y a seulement deux psychiatres diplômés en 2009. Il faut 2.500 psychiatres pour respecter les normes», souligne-t-il. Moussaoui appelle «à une formation globale et un résidanat spécifique pour la psychiatrie». D’autant plus que le budget du ministère de la Santé pour la psychanalyse a été multiplié par 10.
A elle seule, Casablanca compte 100.000 cas de malades mentaux! Ces derniers n’ont droit qu’à 200 lits, sans oublier les patients sans domicile fixe qui sont d’abord un danger pour eux-mêmes. Une fois stabilisé, le patient ne dépend plus des hôpitaux.
D’ailleurs, une circulaire du ministère de la Santé précise que les hôpitaux ne sont pas des structures sociales. Moussaoui fait remarquer qu’il y a une grande sensibilité des pouvoirs publics en ce qui concerne les phénomènes des drogues et des addictions auxquelles des centres ont été créés à Casablanca et à Salé.
Pour expliquer l'augmentation des troubles mentales, les psychiatres désignent (conclusions de psychiatres français):
- Le délitement des repères sociaux - Éclatement de la cellule familiale - Effritement de l'autorité parentale - Disparition des tabous - Consécration de l'enfant roi - Montée en puissance des individualismes
En quelques décennies ce qui structurait tant bien que mal les individus a volé en éclat.
Pour se construire socialement une personnalité a besoin de contenants (des éléments référents qui vont la contenir). Faute de quoi, elle n'a plus de soupape, plus de limites, et c'est la porte ouverte au désordre psychique).
Un phénomène auquel les plus jeunes générations sont particulièrement exposées.
- Crise - Mondialisation - Fragilité de l'emploi - Sentiment accru d'insécurité
Alimentent un climat anxiogène dont les effets sur le mental sont beaucoup plus profonds qu'on ne l'imagine. Notre psychisme redoute le changement. |