Le son qui se déchaîne pendant la publicité irrite nombre de téléspectateurs. Depuis plusieurs années, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) reçoit en moyenne 3 plaintes par semaine.
L'autorité de régulation vient d'annoncer que le son baissera à partir du 1er janvier 2012. Un an plus tard, il ne devra plus dépasser celui des autres programmes.
La loi posait déjà que le volume sonore des publicités ne doit pas excéder le volume moyen du reste du programme. Mais elle est contournée, notamment depuis l'avènement du numérique et l'utilisation, par les publicitaires, de la technologie dite de la "compression". Empruntée à l'industrie musicale, elle permet de gonfler l'intensité sonore sans pour autant augmenter le volume.
"Compresser consiste à remonter le niveau faible au niveau fort", explique Christian Hugonnet, acousticien et président de la Semaine du son, qui a fait partie de la commission technique du CSA en charge de ce dossier. "Imaginez Le Boléro de Ravel sans son très long crescendo ! La compression donne une musique sans nuances", explique-t-il.
Théoriquement, donc, les programmes publicitaires respectent le "gabarit électrique" de diffusion qui leur a été imposé. "Mais dans la pièce où l'on regarde la télévision le nombre de décibels augmente, car le son compressé qui passe dans le gabarit est perçu à un niveau plus fort", explique M. Hugonnet.
Désormais, il faudra "harmoniser les niveaux sonores à l'intérieur du gabarit", ajoute-t-il. "Imaginez la fente d'une boîte aux lettres, propose-t-il. Jusqu'à présent, les lettres devaient passer par la fente mais pouvaient être de différents formats. Désormais elles devront toutes être au même format."
C'est en accord avec les chaînes et les publicitaires que le CSA a voté sa délibération. "Il a fallu 3 ans pour mettre tout le monde d'accord !", s'exclame Christine Kelly, présidente du groupe de travail "publicité et protection des consommateurs". "Les publicitaires étaient farouchement contre", explique l'ancienne journaliste. Et pour cause : ils veulent que leurs messages soient entendus dans tout l'appartement. La baisse de l'intensité sonore, en outre, aura un coût important, puisqu'ils devront réenregistrer les sons de leurs anciens spots. Quant aux chaînes, elles prétendaient ne pas être concernées.
La pression des associations de consommateurs, une recommandation de l'Union européenne de radio-télévision, la plus importante association professionnelle de radiodiffuseurs nationaux dans le monde, ainsi que la concertation entreprise ont permis de modifier les points de vue. Les mesures décidées s'imposeront "à toutes les chaînes, historiques, numériques, câblées ou par satellite, quel que soit leur mode de diffusion (ADSL, fibre optique, Internet)." "Nous sommes le premier pays du monde à nous y mettre", se réjouit Mme Kelly, qui dit recevoir de nombreux mails de félicitations. "Les Etats-Unis ne le feront que fin 2012, le président Obama ayant tapé du poing sur la table."
Dès le 19 décembre, lorsque le téléspectateur passera d'une chaîne à l'autre, le son devra être homogène. Cela impose de reprendre tous les programmes, "y compris les "Commissaire Moulin" ou "Maigret"", précise Mme Kelly, afin qu'ils respectent une intensité moyenne de "- 23 LUFS", la norme arrêtée.