Maroc :Accessibilité des bâtiment aux handicapés : des avancées

Il s’agit d’une convention de partenariat signée entre :
Badre Kanouni président d’Al Omrane
Mohamed El Khadiri, président de l’Amicale Marocaine des Handicapés (AMH).

Cette convention permettra aux deux partenaires d’élaborer et mettre en oeuvre un ensemble de mesures pour l’intégration de principes et de normes permettant l’usage et l’appropriation de l’espace aux personnes handicapées au niveau des projets lancés par Al Omrane et ses filiales.

Au menu également la réalisation d’un guide technique pour la mise en oeuvre des normes nationales relatives à l’accessibilité dans les projets d’aménagement et de construction. Ce guide sera mis à la disposition des autres promoteurs immobiliers.

Par cette convention, la priorité sera accordée aux personnes à mobilité réduite pour bénéficier d’unités de logement accessibles, au RDC des bâtiments réalisés par Al Omrane. Le ministre de l’Habitat vise à généraliser cette mesure à l’ensemble des promoteurs immobiliers.

Il s’engage également à activer la publication du décret concernant les dispositions nécessaires relatives à l’accessibilité dans les secteurs de l’urbanisme, le transport et la communication.

Sur ce volet, le président de l’AMH tient à pointer du doigt le retard enregistré dans la publication de ce texte qui correspond à une loi remontant à 2003. Le cadre réglementaire sera renforcé davantage par l’introduction de mesures spéciales concernant l’accessibilité au profit des handicapés dans le projet du code d’urbanisme en cours de réalisation, selon Benabdellah.

Il ne faut pas oublier le volet sensibilisation et formation qui figure parmi les axes principaux de cette convention. Pour passer à l’action, une journée d’information et de sensibilisation relative à l’accessibilité a été ouverte juste après la signature de la convention.


Dossier sur l'handicap : http://www.mizania.com/content/view/29/59/

Retour sur le sujet avec plus de détails :

Al Omrane vient de signer une convention avec l’Amicale Marocaine des Handicapés (AMH) portant sur l’accessibilité de ses constructions. Le groupe s’engage au «respect et à l’intégration des normes d’accessibilité» des personnes en situation de handicap, que ce soit au niveau des bâtiments à usage collectif, des aménagements extérieurs ou des établissements recevant du public.

La convention mentionne aussi la sensibilisation et la formation des architectes, ingénieurs et techniciens du holding, et la mise à disposition des logements accessibles (notamment en rez-de-chaussée) en priorité aux personnes à mobilité réduite (ndlr comprenant les handicapés, les personnes âgées, les femmes enceintes et les enfants).

La collaboration avec l’AMH à la création d’un nouveau guide des normes des accessibilités pour les personnes handicapées est aussi à l’ordre du jour. Ce guide offre la base sur laquelle les futurs constructeurs «responsables» devront s’appuyer. Le guide existant, édité par le ministère du Développement social de la Famille et de la Solidarité sous Nouzha Skalli, «comporte des zones d’ombre et de flou que la cause ne peut pas se permettre» estime Mohamed El Khadiri, président de l’AMH.

«L’école nationale d’architecture pourrait participer à l’élaboration de ce guide en gestation via son laboratoire de recherche en accessibilité» précise Amal Benmansour architecte, membre de l’AMH et professeur à l’ENA (ndlr où il enseigne un module d’accessibilité en architecture créé il y a deux ans).

Ikbal Kettani, directeur adjoint de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), «salue cette initiative car il s’agit d’une première au Maroc». Pour lui, ce sera l’occasion de «sensibiliser les membres de la Fédération dans le but de généraliser cette démarche». Les actions à mener sont encore en discussion.

Lors de la signature de la convention, le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat Nabil Benabdallah a promis une circulaire dans les plus brefs délais. Celle-ci impliquerait l’Etat dans le droit à la citoyenneté des personnes handicapées. L’AMH espère qu’aucune autorisation de construction ne soit donnée à des institutions publiques ou accueillant le public si celles-ci ne sont pas accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Le procès de l’AMH a une portée symbolique

Le Maroc compte plus d’1,5 million de handicapés. L’urgence d’une stratégie qui cible cette population ne souffre donc aucun doute. Le gouvernement de Driss Jettou en avait pris conscience, et a promulgué une loi sur les accessibilités (ndlr n°10-03). Il lui manquait en revanche une circulaire co-signée par les ministères de l’Urbanisme, de la Solidarité et de l’Intérieur pour qu’elle soit effective. Cette circulaire est encore en attente, mais l’espoir renaît, 9 ans plus tard. La Convention internationale pour les personnes handicapées -ratifiée par le Maroc en 2009- n’est pas respectée non plus. Dans la Constitution, au-delà de la non-discrimination en raison notamment du handicap, l’article 31 prévoit de «réhabiliter et intégrer dans la vie sociale et civile les handicapés physiques sensorimoteurs et mentaux et faciliter leur jouissance des droits et libertés reconnus à tous». La réalité est toute autre. Ni les collectivités locales, ni les tribunaux, ni les écoles, ni les cafés, ni même les chaussées ne sont adaptés à cette population. «Il s’agit donc bien là d’une discrimination par le handicap», renchérit El Khadiri. «Nous sommes les otages de notre environnement, et cela a un impact direct sur les projets de vie de chacun d’entre nous». Une étude publiée en 2006 par le secrétariat d’Etat chargé de la famille, de l’enfance et des personnes handicapées a démontré que «71,8% des personnes en situation de handicap n’ont aucun niveau d’instruction».

A Casablanca en particulier, la politique d’urbanisme ne se soucie guère des difficultés des handicapés. L’AMH a donc décidé de porter plainte contre le Conseil de la ville. «Nous avons 30 000 adhérents handicapés. Si nous décidons de manifester, et en sachant que chacun sera accompagné d’au moins une personne chargée de faciliter sa mobilité, nous pouvons bloquer toute la ville» explique le président de l’AMH. Mais il préfère ester en justice, non pas pour condamner qui que ce soit, mais plus pour la symbolique du geste. «Il est temps que la société se rappelle que nous existons, que nous avons nos droits et qu’il faut les respecter», conclut-il.

Après Al Omrane qui s’est engagée à introduire cette donne dans chacune de ses constructions, c’est au tour de l’Etat d’agir dans ce sens.

Le 2 mars dernier, le ministère des Finances a signé, avec la Banque Mondiale, le déblocage d’un fond de 3 millions de dollars octroyés par le gouvernement japonais.

Bassima Hakkaoui, a présenté par la suite le business plan de ce projet d’«accessibilisation».

- Ainsi, 1.800.000 dollars seront consacrés à la mise à mise en place de rampes d’accès au niveau des administrations et des espaces publics de Marrakech, qui fera office de «ville-pilote». Le chantier commencera en janvier 2014, lorsque les études et les plans nécessaires seront achevés.

- Les villes de Casablanca, Rabat, Oujda et Tanger ne sont pas en reste. Le projet prévoit un soutien de 120.000 dollars, alloué à la réalisation d’un diagnostic de l’accessibilité de leurs espaces publics aux personnes à mobilité réduite. L’intégration de cette dimension dans les cahiers de charge de réaménagement des espaces urbains fait aussi partie du plan.

- Le secteur du transport public est aussi concerné par la mouvance. Une enveloppe de 250.000 dollars lui est dédiée pour préparer son plan d’accessibilisation, autant au niveau routier, ferroviaire, qu’aérien.

- 200.000 dollars seront exclusivement consacrés à la sensibilisation au sujet.

- Les ministères de l’Intérieur, de la Solidarité, des Transports et des Finances, ainsi que les collectivités publiques, devront travailler en bonne intelligence pour la concrétisation de ce projet. Si cette problématique touche autant d’acteurs, c’est qu’elle est transverse, et affecte la vie de millions de personnes, tous les jours et dans tous les domaines.

La Constitution prévoit de «bannir et combattre toute discrimination à l’encontre de quiconque, en raison … d’une situation de handicap».