Elles sont dix fois plus petites que l'épaisseur d'un cheveu, mais elles peuvent entraîner des maladies graves. Si la qualité de l'air s'est globalement améliorée en France depuis dix ans, les particules fines, des composés solides en suspension émis par la combustion, n'en demeurent pas moins préoccupantes pour la santé.
Le seuil d'alerte est déclenché à partir d'une concentration de 80 microgrammes de PM10 (particules de diamètre inférieur à 10 microns) par mètre cube d'air. De nombreuses autres régions ont quant à elles franchi le niveau d'information, enclenché à partir de 50 µg.
La France dépasse chaque année les normes européennes en matière de pollution atmosphérique, au point d'être poursuivie devant la Cour de justice de l'Union européenne. « On est passés d'une pollution aiguë, avec de fortes concentrations, il y a trente ans, à une pollution plus faible mais chronique, donc tout aussi grave, aujourd'hui », déplore Patrice Halimi, chirurgien-pédiatre et secrétaire général de l'Association santé environnement France.
D'où viennent les particules fines ?
Les particules fines sont présentes naturellement dans l'environnement du fait de l'érosion provoquée par le vent, de tempêtes ou d'éruptions volcaniques. Mais les activités humaines ont considérablement augmenté leur concentration atmosphérique.
Selon le rapport d'avril du Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (Citepa), les principaux secteurs responsables sont :
- la transformation d'énergie par l'industrie (31 %) ;
- la combustion de bois pour chauffer les habitations (30 %) ;
- l'agriculture avec l'utilisation d'engrais (20 %) ;
- les transports, du fait notamment de la combustion de diesel (15 %).
Malgré sa dangerosité avérée, le diesel continue de bénéficier d'une fiscalité favorable en France, où il représente 60 % du parc automobile.
A ces particules considérées comme « primaires », s'ajoutent d'autres, « secondaires ». Dans certaines conditions, des gaz comme l'ammoniac, les oxydes d'azote ou les composés organiques volatils (COV) peuvent se transformer en particules fines dans l'atmosphère.
« La situation climatique est également très importante, prévient Julien Vincent, responsable du département énergie et industrie du Citepa. En cas de grand froid, d'absence de vent ou d'anticyclone, l'air ne se renouvelle pas, augmentant les taux de particules en suspension. »
Quels risques sanitaires entraînent-elles ?
Les particules fines étant en suspension dans l'air, il y a un risque constant de les inhaler. Deux catégories de particules sont particulièrement encadrées par les normes de qualité de l'air : les PM10 (« particulate matter » en anglais), de diamètre inférieur à 10 micromètres (ou 10 µm, soit 10 millièmes de millimètre) et les PM2,5, qui mesurent 2,5 microns et peuvent donc facilement pénétrer dans l'organisme.
« Elles sont nocives pour l'organisme, car elles progressent jusqu'au bout des voies respiratoires, atteignent les alvéoles et entraînent des maladies pulmonaires, explique Patrice Halimi. Elles pénètrent ensuite dans la circulation sanguine et provoquent aussi des problèmes cardiovasculaires en bouchant les petits vaisseaux. » La liste des maux est longue : bronchite chronique, asthme, cancer du poumon, accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde ou encore problèmes placentaires.
En octobre 2013, la pollution de l'air extérieur a été classée parmi les « cancérogènes certains » pour les humains par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l'Organisation mondiale de la santé. Cependant, il reste difficile de chiffrer précisément l'impact sanitaire des particules fines en termes de morts prématurées. Le chiffre de 42 000 morts en France, et de 386 000 en Europe, est régulièrement avancé par les hommes politiques et les médias, mais il est fondé sur une étude de la Commission européenne utilisant des données datant d'une quinzaine d'années.
Une étude conduite par le Dr Rob Beelen (université d'Utrecht, aux Pays-Bas), publiée lundi 9 décembre 2013 dans la revue médicale The Lancet, a conclu qu'une exposition prolongée aux particules fines a un effet néfaste sur la santé, même lorsque les concentrations restent dans la norme de l'Union européenne (de 25 microgrammes par mètre cube d'air). Selon ces travaux, chaque hausse de 5 microgrammes par mètre cube de la concentration en PM2,5 sur l'année augmente le risque de mourir d'une cause naturelle de 7 %.
Quelle est l'évolution des concentrations de particules fines ?
Les émissions de particules sont en baisse depuis 1990, date des premières mesures. Grâce à l'arrêt d'industries polluantes comme les mines, à de nouvelles normes dans les transports et à des modes de chauffage plus efficaces (notamment pour les poêles à bois), elles sont ainsi passées de 534 000 tonnes en 1990 à 260 000 en 2011, soit une baisse de 51 %, selon le Citepa.
Emissions atmosphériques de PM 10 par secteur en France métropolitaine en kilotonnes.
Mais, dans le même temps, les concentrations de particules sont restées plutôt stables. Ainsi, dans l'agglomération parisienne, la concentration moyenne de PM10 était de 25 microgrammes par mètre cube d'air (25 µg/m3) en 2011 contre 21 µg/m3 en 2000, selon le bilan 2012 d'AirParif – le changement de méthode de calcul de l'agence en 2007 a entraîné une hausse des valeurs moyennes annuelles de l'ordre de 30 %. Quant aux concentrations de PM2,5, elles s'élevaient à 16 µg/m3 en 2012 contre 14 µg/m3 en 2000. En 2012, en Ile-de-France, les seuils d'information et d'alerte ont été dépassés durant 40 jours.
Evolution de la concentration moyenne annuelle de particules 2,5 dans l'agglomération parisienne de 2000 à 2012, dans les stations urbaines de fond.
« On ne sait pas encore si la baisse des émissions va se traduire par une diminution des concentrations. D'autant que les polluants atmosphériques sont transfrontaliers : ils arrivent aussi en France du reste de l'Europe par les vents. Les PM2,5 voyagent notamment sur de longues distances », explique Julien Vincent.
Comment se protéger contre cette pollution ?
Pour tenter de limiter cette pollution, les préfectures de police émettent des recommandations à chaque déclenchement du seuil d'alerte. En Ile-de-France, la préfecture a instauré, mercredi 11/12/2013, une baisse de 20 km/h sur toutes les routes où les vitesses maximales sont supérieures ou égales à 80 km/h et a notamment appelé à « limiter l'usage des véhicules diesel non équipés de filtres à particules », ainsi que « les transports routiers de transit ».
La Ville de Paris a également rendu gratuit le stationnement résidentiel pendant la journée du 10 décembre 2013 afin de favoriser les déplacements en transports en commun. Enfin, les feux de cheminée en foyer ouvert sont interdits depuis mardi.
L'Agence régionale de la santé recommande par ailleurs aux personnes sensibles aux polluants atmosphériques, notamment les enfants, personnes âgées ou souffrant d'asthme et d'insuffisance respiratoire chronique de privilégier des activités calmes et d'éviter la pratique intensive du sport.
Extraits de : http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/12/12/tout-comprendre-a-la-pollution-de-l-air-aux-particules-fines_3529330_3244.html