Un bilan d’année morose, associé à une légère reprise depuis le mois de septembre. Voici, peu ou prou, le constat établi par les acteurs du secteur dans les 6 villes du Royaume où la vie économique a mené l’enquête : Agadir, Marrakech, Rabat, Tanger, Fès et Casablanca.
Pourquoi la crise du haut standing ?
C’est incontestablement le segment du haut standing qui a souffert le plus : en l’espace de 18 mois, - depuis l’été 2008- les prix de vente de biens ont chuté jusqu’à 40%.
Estimée à 5% sur le territoire national, la demande pour ces produits, dits de haut standing, reste davantage liée à la baisse de la demande étrangère, composée essentiellement de Marocains résidents à l’étranger (MRE) et de clients européens et américains. La crise économique et financière qui a sévi sur les deux continents dissuade les clients potentiels qui préfèrent remettre à plus tard leur investissement
Crise ou pas crise, le créneau commençait depuis plusieurs mois déjà à montrer des signes d’essoufflement, face à une clientèle devenue plus avertie et pointilleuse. Si avant les acheteurs n’avaient pas de grandes exigences face à une offre réduite et restreinte, ils ont gagné en connaissance et compétence.
Confiants, les promoteurs et propriétaires gourmands ont continué à afficher des prix excessifs et bien au-dessus de la qualité des produits. Jusqu’au moment où ils se sont rendu compte que la demande avait pratiquement disparu. «Dans le Guéliz à Marrakech, nous avons vu des projets vendus à 20 000 DH le mètre carré descendre jusqu’à 12 000 DH», indique le directeur de Carré Immobilier.
Le marbre ne veut pas dire forcément haut standing
Comment le marché en est arrivé là ? En plus de la traditionnelle inadéquation entre l’offre et la demande due aux superficies des habitations bien souvent beaucoup trop grandes, l’on trouve également l’éternel problème de la qualité.
Le problème vient du fait que de nombreux promoteurs construisent tout et n’importe quoi. Ils savent très bien faire dans le clinquant. Réaliser une entrée tout en marbre est à leur portée, seulement, en y regardant de plus près, l’on s’aperçoit que de nombreuses choses font défaut : l’épaisseur des murs, la provenance des matériaux, l’origine des produits posés dans l’appartement, la qualité des robinetteries. Lorsqu’un promoteur propose un haut de gamme supérieur qui en réalité s’apparente plutôt à du moyen de gamme, et qu’il annonce un prix de départ de 18 000 - 20 000 DH/m2, il ne faut pas s’étonner que les prix tombent ensuite.
Perte de confiance des clients
Assistant à la baisse des prix plus ou moins importante selon les régions, les particuliers ont perdu en confiance face à un climat teinté de folles spéculations et de surenchères.
Pour l’heure, les prévisions des opérateurs pour les 6 prochains mois sont formelles : les prix ne baisseront plus et seront maintenus.
Suppression des 20 % d’avance, moins de noir
Mais faute de pouvoir baisser les prix, certains promoteurs commencent à user d’autres méthodes.
Certains acceptent de faire signer des compromis de vente aux particuliers sans exiger les 20% d’avance requis selon les termes habituels.
Autre phénomène de nature à réjouir les particuliers : la pratique du non-déclaré (le noir) systématiquement exigé par le vendeur, tend à se réduire, allant jusqu’à disparaître de certains projets.
Bien que certains grands groupes aient officiellement banni ce genre de pratiques, il n’en demeure pas moins que le noir reste encore répandu dans le secteur à tel point que sur 10 ventes perdues, 6 sont causées par le problème du noir. Dans certaines villes comme Tanger ou Fès, cette somme pouvait atteindre des pics allant jusqu’à 50% du prix total de la vente, la moyenne communément admise est de 20 à 30% selon les villes.
Mais le noir est aujourd’hui en perte de vitesse dans toutes les villes. Mieux encore, des promoteurs ont compris que proposer des prix transparents s’avère être un créneau lucratif afin de récupérer une partie de la clientèle généralement éconduite par les promoteurs exigeant du noir.
Assainissement du marché et sélection naturelle
Partout, les opérateurs évoquent l’une des conséquences positives de la récession : l’éviction des non-professionnels du marché, forcés de retourner à leur ancien métier. Le boom immobilier dans le Royaume a fait naître des vocations de promoteurs et d’agences-immobilières à des personnes dont le métier était tout autre. Avec la baisse sensible des demandes, les intermédiaires ou samsaras sont retournés à leur premier métier, de nombreux petits promoteurs se retrouvent au chômage et sont parfois contraints de baisser leur prix afin de liquider leur stock.
Aujourd’hui, les particuliers désirent être encadrés du début jusqu’à la fin d’une transaction et c’est le cas dans les agences. Les agences commencent à recruter des samsara qui leur ramènent des clients et obtiennent une commission sur les 5% perçus par notre agence.
Moyen standing et logement économique : production en temps mort
Délaissé ces dernières années par les promoteurs qui s’étaient lancés dans le haut de gamme, les produits de moyen standing et économiques, dont les prix ont légèrement baissé selon les villes, sont devenus une denrée rare. Pourtant, la demande d’acquisition sur ces segments sera amenée à être soutenue dans les prochaines années à venir.
Source : la vie éco