Le ministre de l’intérieur va proposer une réduction du nombre de titres de séjour délivrés chaque année

Après avoir annoncé la semaine dernière vouloir "réduire l'immigration légale", le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a donné quelques précisions, mardi 12 avril, quant aux propositions qu'il fera "dans les prochains jours" pour parvenir à cet objectif.

"Nous devons aujourd'hui nous poser la question d'une nouvelle étape dans la maîtrise de l'immigration légale", a réaffirmé Claude Guéant dans l'hémicycle du Sénat, où il défendait le projet de loi sur l'immigration discuté en seconde lecture. "Je ferai des propositions de réduction du nombre de titres de séjour délivrés chaque année", a-t-il dit sans donner plus de détails.

Mardi, lors d'un déplacement dans le Val d'Oise, il a confirmé cette volonté de réguler les flux migratoires pour favoriser "l'intégration" des étrangers en France. "La France doit rester fidèle à elle-même, à ses valeurs. Pour éviter les tensions, les préjugés, voire la xénophobie, les flux migratoires doivent rester proportionnés à ce que notre pays est en mesure d'accueillir", a-t-il ajouté.

Interrogé vendredi soir sur TF1, le résident de la place Beauvau a annoncé pour la première fois vouloir faire passer "dans un premier temps de 200.000 à 180.000" le nombre d'étrangers admis chaque année légalement dans le pays.

Le ministre devrait chercher ces réductions "dans tous les segments de l'immigration légale", a-t-on expliqué au ministère en citant notamment "l'immigration de l'emploi" et celle liée au "regroupement familial".

Selon le ministre, "24 % des étrangers non européens qui se trouvent en France sont des demandeurs d'emploi" et il a jugé vendredi, comme l'avait dit le président Nicolas Sarkozy en novembre que "l'intégration est en panne" en France.

Au total, 11,5 millions d'immigrés ou enfants d'immigrés résident en France, soit 19% de la population et près de 180.000 personnes arrivent dans l'Hexagone chaque année, selon des chiffres du Haut conseil à l'intégration.

En 2010, l'immigration légale en France a augmenté d'environ 10,6% en un an, à 188.780 arrivants, sous l'effet notamment d'une forte hausse du nombre d'étudiants, d'après des statistiques de l'Office français de l'immigration (Ofii). Ce chiffre global comprend l'immigration familiale (81.100 personnes, 4% de plus qu'en 2009), l'immigration professionnelle (31.500 personnes, stable), le droit d'asile (10.340, stable) et les étudiants (65.840 personnes, en augmentation de 28,5%).

Le ministre du travail a annoncé, dimanche 17 avril, lors de l'émission Le Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro, vouloir réduire la liste des métiers pour lesquels le recours à une main d'œuvre étrangère est facilité.

Figurent sur cette liste les métiers pour lesquels il existe des difficultés de recrutement, dits "métiers en tension". Le ministre du travail entend "former les demandeurs d'emploi pour occuper ces postes" au lieu de faciliter le recours à des travailleurs étrangers.

Plus du tiers des prévisions d'embauche (37, 6%) butent sur des difficultés de recrutement, selon l'enquête annuelle de Pôle emploi. "La façon dont je veux réorienter l'action du Pôle emploi et de tous les acteurs de l'emploi, c'est justement de travailler sur ces métiers en tension", a souligné M. Bertrand, qui estime "possible de réduire l'immigration légale, notamment liée au travail".

Le ministre n'a pas été en mesure de donner une estimation de la baisse du recours à la main d'œuvre étrangère. Il a précisé que "l'immigration liée au travail" représentait "à peu près 20 000 personnes".

La patronne du Medef, Laurence Parisot, a estimé dans un entretien au Monde, samedi, qu'il ne fallait pas faire de l'immigration légale liée au travail "un problème". Face à la montée du populisme, a-t-elle ajouté, "le plus grand danger, ce serait de se refermer".

Vivement 2013 qu’on finisse avec tout ça.

Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a estimé dimanche que la France "n'a pas besoin de maçons, de serveurs de restaurants" issus de l'immigration, car elle dispose "de la ressource" nécessaire. "Contrairement à une légende, il est inexact que nous ayons besoin de talents, de compétences" issues de l'immigration, a affirmé M. Guéant au Grand rendez Europe1/Le Parisien.

Il a indiqué qu'"il y a de l'ordre de 2.000 personnes - on peut avoir ces besoins - qui viennent chaque année à ce titre" légalement en France. Mais "je constate que nous avons en France 2.650.000 demandeurs d'emploi", a ajouté M. Guéant, rappelant son objectif de réduire de 200.000 à 180.000 le nombre d'immigrés admis légalement sur le territoire. Il a ajouté que la France "a une démographie qui lui permet d'amener chaque année 110.000 personnes de plus en population active". Rappelant la "doctrine" du président Nicolas Sarkozy, il a ajouté qu'"on ne peut pas refuser indéfiniment un travail normal. Et quelqu'un qui refuse plusieurs fois un travail normal ne doit plus être inscrit comme demandeur d'emploi et bénéficier des aides publiques".

"Contrairement à ce qu'on dit, l'intégration ne va pas si bien que ça: le quart des étrangers qui ne sont pas d'origine européenne sont au chômage, les deux tiers des échecs scolaires, c'est l'échec d'enfants d'immigrés", a affirmé M. Guéant. "Donc, ce que je voudrais, c'est que le flux des étrangers dans notre pays soit traitable (...), que nous soyons capables d'intégrer ces populations", a poursuivi le ministre.

M. Guéant s'est défendu de reprendre des idées du Front national: "Jamais ces idées ni ces mots n'ont été utilisés. Ce sont des mots, il n'y a rien derrière, y compris en matière d'immigration".

Selon le Parisien, qui cite des chiffres de l'institut national des études démographiques (Ined) - et d'universitaires, bien loin d'être un poids pour l'économie, l'immigration du travail rapporte. Selon des chercheurs de Lille 2 cités par le quotidien, le ratio entre aides d'Etat qu'ils reçoivent - RSA, allocation chômage - et qu'ils reversent - via la TVA, l'impôt, les cotisations sociales - représente un solde positif de 12,4 milliards d'euros.

Bien loin de prendre leur travail aux Français, les immigrés occupent les postes pour lesquels les Hexagonaux se pincent le nez. "Admettons que l'on stoppe l'immigration. L'économie ne pourrait pas fonctionner : chantiers en retard, hôpitaux saturés", estime Joël Oudinet, économiste, cité par Le Parisien. De quoi faire mentir Claude Guéant, qui affirmait ce week-end que la France n'avait "pas besoin de maçons, de serveurs de restaurants" issus de l'immigration, car elle dispose "de la ressource" nécessaire".

Autre croyance battue en brêche : les immigrés font baisser les salaires. "Avec les travailleurs immigrés, les employeurs ont accès à une main-d'œuvre acceptant des niveaux de salaire modestes, mais c'est encore plus vrai avec les sans-papiers", indique Joël Oudinet, de l'Ined, dans le Parisien. Sur les 20 000 immigrés ayant obtenu un titre de séjour à titre professionnel en 2009, précise le quotidien, 16% sont ouvriers ou employés non qualifiés.

"Les cadres, techniciens et ingénieurs représentent 80% des nouveaux entrants en 2009", indique le Parisien. Le nombre d'immigrés progresse par ailleurs depuis les années 90. "Entre 1994 et 2005, les entrées en provenance des pays hors de l'Europe sont passées de 120.000 à 208.000 par an", selon le Parisien qui cite l'Ined.