Et c’est la cour des comptes qui le dit dans un rapport rendu public mardi 21 février 2012 "relations de l'administration fiscale avec les particuliers et les entreprises ".
Conçue par Nicolas Sarkozy comme emblématique de sa volonté de moderniser l'Etat, la fusion des centres des impôts et des trésoreries au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFIP), créée en 2008 aura été un chantier pharaonique.
La réforme, achevée en 2011, s'est accompagnée du non remplacement de deux fonctionnaires sur trois partant en retraite. Engagée pour réduire les dépenses publiques, elle devait aussi, selon le gouvernement, améliorer " la qualité de service ".
Cet objectif n'a pas été entièrement atteint.
La DGFIP a "largement communiqué" sur la généralisation de "l'interlocuteur fiscal unique " pour le calcul et le paiement de l'impôt, constate la Cour.
Or, pour 45% de la population, le guichet unique n'existe pas. Il subsiste " de fortes disparités d'accès au service ", souligne le rapport. Près de la moitié des particuliers doit s'adresser à deux agents différents en deux lieux distincts selon qu'il s'agisse du calcul ou du paiement de ses impôts. L'obligation d'une double démarche perdure surtout dans les zones rurales et périurbaines.
Pour offrir une vitrine à la nouvelle DGFIP, l'accueil physique du public a été développé. Les quelque 3 millions de personnes qui se rendent chaque année à un guichet ont un service de "qualité inégale ", constate la Cour. Pour plusieurs raisons : les agents n'ont pas été suffisamment préparés à répondre au public. Ils y sont, pour certains, réticents car ils considèrent comme une mission supplémentaire qui suppose d'être polyvalent. Mal valorisée, elle les expose, en outre, parfois à des comportements agressifs de la part de personnes qui de plus en plus nombreuses viennent demander des délais de paiement.
L'accueil téléphonique reste "un point noir", selon la Cour. Les agents "admettent qu'ils sont difficiles à joindre" et reconnaissent que pour eux "l'appel est jugé intrusif et gênant". Le matériel est parfois "obsolète". Les usagers sont mécontents d 'un service qu'ils vont jusqu'à juger "inopérant", indique le rapport.
L'administration fiscale n'a pas anticipé l'explosion des courriels. Ce mode de relation suscite toujours des réticences de la part des agents et connaît des dysfonctionnements techniques. Le paiement de l'impôt par téléprocédure s'est certes bien développé. 87% de la recette de l'impôt sur le revenu ont été prélevés par internet. Il fonctionne mal pour les entreprises qui subissent des embouteillages sur le réseau .
Enfin la Cour critique le "net déficit de simplicité, de clarté et de transparence" s'agissant des procédures de recours. Depuis 2005, des "conciliateurs fiscaux départementaux" doivent permettre d'éviter les actions contentieuses. Ils traitent 80 000 réclamations en moyenne par an. Présentés comme des autorités indépendantes, les conciliateurs sont des cadres supérieurs de l'administration fiscale. Il arrive même qu'ils soient l'auteur de la décision contestée. "L'exigence d'impartialité et d'indépendance du conciliateur fiscal n'est pas satisfaite ", indique le rapport.
Malgré les progrès engagés depuis 2008, l'administration fiscale n'a pas abandonné sa "culture régalienne ". La lecture du rapport montre que les contribuables sont encore considérés comme des "assujettis". Une meilleur écoute des "usagers" encouragerait pourtant, en retour, le "civisme fiscal ", estime la Cour des comptes.