Perdus face à la chute vertigineuse de la Bourse de Casablanca, les particuliers, investisseurs individuels, ont le sentiment d’être dépassés par les événements.
Nombreux sont ceux qui estiment qu’ils manquent d’informations, pire qu’ils sont «induits» en erreur par les recommandations des sociétés de Bourse.
Face à la morosité du marché, la perte du Masi de plus de 6% depuis le début de l’année, certains se demandent même, «s’il ne faut pas abandonner la Bourse». En clair, ils ont perdu leurs repères estimant qu’il y a une incohérence chronique entre les prévisions et le comportement du marché. A cela s’ajoute, «un décalage manifeste entre l’évolution des cours des sociétés cotées et leurs fondamentaux. Ceux-ci ne se reflètent souvent pas», remarque, un investisseur médusé.
Plus de communication sur ce point et sur bien d’autres pourrait atténuer la perception dubitative des acteurs de marché. A ce titre, plusieurs petits investisseurs présents ont exprimé le besoin d’une communication plus régulière avec les sociétés cotées. Cela relance ainsi le débat sur la nécessité d’imposer aux entreprises de la cote de Casablanca à publier leurs agrégats financiers chaque trimestre à l’instar des pratiques dans les places internationales.
Aujourd’hui, l’obligation est semestrielle. En plus des publications, il est vivement recommandé aux sociétés introduites de tenir des réunions de présentations de l’évolution de leurs agrégats aux analystes. Or, très peu d’entre elles jouent le jeu. En 2011, seulement 32 sociétés cotées sur 79 ont tenu de telles réunions. «Ces genres de réunions contribueront, en partie à ramener de la confiance», espère un gestionnaire de portefeuille qui vit, incrédule, la chute des volumes suite à l’attentisme et le désarroi des investisseurs.
Autre motif de perte de confiance, les décalages entre les prévisions des sociétés de Bourse et la réalité du terrain. Ces «petits» actionnaires pointent ainsi les décalages qui existent entre les cours en Bourse et ceux issus des évaluations des analystes. «Ces décalages sont fondamentalement, tout à fait, normaux étant donnée la différence de calcul des cours en Bourse et des cours cibles des analystes. Néanmoins, ils ne devraient pas exister dans les marchés efficients», rétorque Ali Hachimi, patron d’Upline Securities.
De son côté, Youssef Benkirane, président de l’APSB, recommande plutôt que de se limiter au cours cible, aux investisseurs de s’intéresser davantage aux hypothèses sous-jacentes qui servent de base à la construction de la recommandation. D’autant plus que pour plusieurs professionnels, les analyses des bureaux de recherches sont surtout destinées aux institutionnels, gérants d’OPCVM. D’où une recommandation de s’orienter, pour les particuliers, vers des outils collectifs de placement (Sicav et FCP) qui permettent de diversifier les risques et éviter les pertes abyssales.
Face à ce mécontentement, les professionnels ne sont pas à court d’arguments. Tout en rappelant que la Bourse n’était pas assimilable à un casino, Karim Gharbi, directeur analyse et recherche chez CFG, conseille, à son tour, de se positionner sur un portefeuille d’actions sur le moyen long terme au lieu de tout miser sur une seule valeur à court terme. D’ailleurs, il précise que sur les différentes classes d’actifs, la Bourse présente le meilleur rendement depuis 15 ans avec un taux de croissance annuel de plus de 16% (dividendes compris).
D’après le consensus marché, ce niveau de rendement devrait se maintenir, puisque son évolution est intimement liée à celle de la capacité bénéficiaire des sociétés cotées. En effet, les 5 sociétés de Bourse qui font le consensus tablent sur une reprise d’ici la fin d’année en raison des bonnes perspectives qui se profilent sur les principaux secteurs cotés (banques, télécom, mines, ciment, immobilier). A ce titre, ils prévoient une amélioration des la capacité bénéficiaire de la place de l’ordre de 7 à 8% en 2012. Qui vivra verra.
Au final, tout ce beau monde s’est accordé sur la nécessité d’instaurer et de multiplier ce type de rencontres (professionnels/investisseurs). Ça contribuera peut-être à redonner confiance aux investisseurs.
Mea culpa
Si la Bourse est dans cet état aujourd’hui, c’est en partie à cause d’une accumulation d’erreurs tous azimuts: Les sociétés de Bourse pour avoir encouragé la spéculation, les clients pour avoir spéculé, les institutionnels pour ne pas avoir joué leur rôle et les autorités pour ne pas avoir accéléré les réformes. «Il faut donc savoir reconnaître ses erreurs», admet Benkirane. «Il faut à l'avenir éviter de retomber dans nos travers», ajoute-t-il. Il fait allusion aux pratiques spéculatives, aux manipulations des cours ou encore aux valorisations excessives.
Un petit guide : http://www.mizania.com/content/view/49/56/