Le Conseil d'Etat a interpellé le gouvernement sur les difficultés de mise en œuvre de la loi sur le droit au logement opposable :
1. Une loi mal connue. "Le droit au logement opposable a commencé à être appliqué en décembre 2008. Dans les premiers mois, peu de demandes ont été formulées (environ 60 000) alors les estimations étaient de 600 000 à 800 000. L'administration s'est montrée réticente à diffuser l'information car elle craignait d'être submergée par les demandes. Il faut 12 à 14 mois en moyenne entre le moment où la personne fait sa demande et le moment où elle est relogée.
2. Des conditions d'accès encore floues : La première difficulté est de recueillir des informations sur les demandeurs (ressources, nombre de membres dans la famille...). La loi DALO prévoit 6 catégories de personnes à reloger en priorité qu'il faut combiner avec des dispositions qui existent déjà. Par exemple : si une personne vit dans un logement insalubre, c'est au propriétaire de la reloger, mais doit-on faire prévaloir cette disposition ou admettre la personne comme demandeuse prioritaire au titre du DALO ? Un problème similaire se pose pour les expulsions : doit-on être admis quand on reçoit un avis du propriétaire ou seulement une fois l'expulsion prononcée par la justice ? Il y a clairement un manque d'uniformité et de clarté qui gêne les procédures."
3. Des demandes très disparates sur l'ensemble de l'Hexagone: "On a une disparité très importante des demandes entre les zones géographiques. On constate une forte concentration des demandes dans les agglomérations, notamment en région parisienne, alors qu'il y a des logements disponibles ailleurs. A Paris, on estime que 10 000 logements accessibles aux bénéficiaires de la loi DALO se libèrent chaque année, alors qu'il peut y avoir environ 60 000 personnes. Au niveau national, le véritable nombre de logements mobilisables par les préfets serait de 55 000 logements, alors que 600 000 à 800 000 personnes pourraient, selon nos calculs, demander à bénéficier du DALO."
4. Une mauvaise répartition entre les partenaires. "Les communes, les partenaires sociaux, l'Etat, les offices HLM participent au financement des logements sociaux et ont des droits de réservation sur ces derniers. La loi DALO vient percuter ces dispositifs, et il est difficile de dire sur quels logements on va imputer les candidats au DALO. Par ailleurs, les communes ne participent pas à cette répartition. Il faut que tous les réservataires participent via des accords locaux. C'est un système à revoir d'urgence, sans quoi la loi DALO aura plus de difficulté à être mise en œuvre."
5. Un risque de nouveaux contentieux. "Ce qui inquiète aussi dans la mise en œuvre de la loi DALO, c'est le risque de multiplication des contentieux qu'elle comporte. Que se passe-t-il quand un citoyen déclaré prioritaire n'obtient pas de logement ? Selon la loi, l'Etat peut-être condamné à verser une astreinte qui sera destinée à un fonds de construction de logements sociaux. Mais la loi n'exclut pas non plus que la personne lésée engage une procédure pour obtenir réparation personnellement. L'application de la loi va générer un nouveau contentieux qui n'est pas celui prévu à l'origine mais dont on ne mesure pas encore l'effet."