Le code de la presse originel date de novembre 1958. Revu et corrigé début des années 2000, du temps de l’ex-ministre socialiste de la Communication, Mohamed Achaari. Son successeur du PPS, Nabil Benabdallah, a voulu l’amender mais… Son camarade qui lui succède, Khalid Naciri (2007-2011), a quasiment mis le code de la presse dans les tiroirs.
La réforme vise aussi à interrompre la dégringolade du Royaume dans les classements internationaux de la liberté de la presse. En 2011, le Maroc recule de 3 places (138e) et Reporters sans frontière le case avec les pays où la «situation est difficile».
Nouveaux arrivants : journaux en ligne et la presse gratuite
Nouvelle constitution :
La future mouture élaborée par Khalfi devra prendre en compte la nouvelle constitution. Le ministre de la Communication fait d’ailleurs allusion aux articles 27 et 28 de la Constitution.
L’un des principes annoncés est «le droit d’accès à l’information» reconnu aux citoyens, jetant ainsi aux oubliettes le «droit à l’information».
Ce nouveau droit qui pèse sur l’administration, les institutions élues et établissements ayant une mission de service public doit être couplé à des sanctions pécuniaires pour le rendre plus actif… La protection de la vie privée et de la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat figurent parmi les exceptions.
Tout en garantissant la liberté de la presse, l’article 28 est un bouclier contre «toute forme de censure préalable». Il incombe ainsi à l’Etat «de favoriser l’organisation du secteur de la presse…».
Volet pénal :
Quant au volet pénal de la réforme, le ministère de la Communication livre un premier scénario où émergent 3 positions:
- Suppression des peines,
- leur réduction et amendes basées sur le chiffre d’affaires d’une entreprise de presse.
- Le juge aura le choix entre des sanctions pénales ou des amendes.
Noureddine Miftah, président de la Fédération marocaine des éditeurs des journaux (FMEJ), ne souhaite pas que le code de la presse soit une annexe du code pénal. Il donne pour exemple la diffamation où l’emprisonnement ne serait prononcé qu’exceptionnellement: appel à la violence ou la haine, à la discrimination raciale…
Le futur code devrait «garantir plutôt la liberté d’expression et la protection des journalistes. La profession n’est pas contre les sanctions. Que vaut d’ailleurs une loi sans peines?». Le but est d’instaurer «le principe de proportionnalité» entre l’infraction et la sanction.
Miftah, également directeur de publication de l’hebdomadaire arabophone Al Ayam, fait un parallèle avec le baromètre d’indemnisation des accidents de la route.
Éventuels amendements Articles 41 : La FMEJ estime qu’il va falloir en finir avec les «formulations vagues». Cette disposition prévoit des peines de prison allant de 3 à 5 ans et une amende de 10.000 à 100.000 DH contre un journal ou un écrit portant atteinte à l’Islam, la Monarchie ou l’intégrité territoriale. Une suspension ne dépassant pas 3 mois ou une interdiction peut également être prononcée contre la publication mise en cause. De quoi donner froid dans le dos aux patrons de presse qui demeurent liés par toutes les obligations légales ou contractuelles, y compris avec leurs salariés. Les professionnels demandent à ce que l’article 41 ne consacre pas une peine pénale d’exception. Autrement dit, son alignement avec les autres infractions de même gravité est souhaité.
Article 77 : sur la saisie administrative de tout numéro d’un journal ou écrit dérange. Prérogative qui est accordée au ministre de l’Intérieur. Son arrêté de saisie peut certes être attaqué en référé devant le juge administratif. Ce dernier doit se prononcer dans les 24heures qui suivent sa saisine. «L’éditeur qui prouve le préjudice peut prétendre à des dommages-intérêts», précise Me Lhoussin Aïch, avocat spécialisé dans les délits de presse. L’une des propositions est que la décision de saisir l’édition d’un journal relève du juge.
- L’interdiction d’exercer le journalisme est l’une des sanctions qui suscitent de vives critiques.
Le texte qui porte sur l’instance d’autorégulation et la loi formant statut du journaliste seront joints au futur code de la presse.
La Fédération marocaine des éditeurs de journaux, le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) et le ministère de la Communication ont élaboré un projet relatif au Conseil national de la presse. Les futurs membres de cette instance d’autorégulation seront élus au suffrage universel direct supervisé par un juge. Ils devront notamment arbitrer des litiges opposant des journalistes à des personnes s’estimant «diffamées», veiller au respect de la déontologie… Le ministre de la Communication, Mustapha Khalfi, annonce que même l’octroi de la carte de presse relèvera du Conseil national de la presse. Compétence qu’exerce actuellement le département de tutelle. |