Le lancement officiel du Conseil des imams de France, à Drancy, mercredi 10 juin, en présence de Christine Boutin, ministre du logement, du maire, Jean-Christophe Lagarde et d'autres élus du département - le président du conseil général, Claude Bartolone, l'adjointe au maire de Paris, Anne Hidalgo - mais aussi de diplomates des pays arabes et des Etats-Unis, du président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France), de l'ancien grand rabbin de France René-Samuel Sirat. Mais en l'absence des représentants du ministère de l'intérieur en charge des cultes, de responsables de l'Eglise catholique pourtant instamment invités et, surtout, de membres du Conseil français du culte musulman (CFCM).
Ce demi-succès souligne l'ambiguïté de cette nouvelle instance musulmane, présidée par l'imam de Drancy, Hassan Chalghoumi. Rejoint par une quarantaine d'imams de la région parisienne, il met en avant le "dialogue interreligieux, la promotion d'un islam ouvert et le suivi des imams".
Encouragé par la municipalité, qui a trouvé là une icône du "vivre ensemble", soutenu par la communauté juive qui apprécie son engagement affiché pour le dialogue judéo-musulman, le jeune imam ne fait pas l'unanimité. Ni au sein de la communauté musulmane, ni auprès des pouvoirs publics, qui persistent à voir en lui, un religieux "issu de la mouvance fondamentaliste, formé en Syrie" et "non représentatif".
"Il est pour nous un interlocuteur plus favorable que le CFCM, trop influencé par la politique internationale", soutient Sammy Ghozlan, responsable du Bureau national de vigilance de l'antisémitisme. "C'est un homme d'une extrême courtoisie dont les embrassades médiatiques avec le rabbin Serfaty [l'un des responsables de l'Amitié judéo-musulmane] sont utiles pour le vivre ensemble", insiste Bernard Kanovitch, chargé au CRIF des relations avec les musulmans.
Venue en "catholique", Mme Boutin a de même justifié sa présence en ces termes : "je crois profondément que les religions sont facteurs de médiation et de pacification".
Par la voix de son secrétariat pour les relations avec l'islam, l'épiscopat a en revanche regretté l'instrumentalisation politique du dialogue interreligieux et rappelé son respect pour le CFCM, qui "en dépit de ses limites, demeure l'institution représentative musulmane officielle".
L'effacement du CFCM, favorise la réactivation d'une représentation "culturelle et laïque des citoyens de sensibilité arabo-musulmane", qui pourrait se substituer aux instances existantes dans le dialogue avec les pouvoirs publics et les autres communautés.
Après l'annonce en mai de la création d'une fédération d'associations par le chef d'entreprise Azzedine Bouamama, déterminé à travailler en direction "des personnes âgées, des femmes et des enfants musulmans", c'est au tour de Marouane Bouloudhnine, un médecin niçois, d'annoncer vendredi 12 juin à Paris le lancement au niveau national, de la fédération Mosaïc, qu'il avait créée à Nice en 2007.
"Culturelle et non cultuelle, laïque et apolitique, Mosaïc constituera un espace d'expression pour cette majorité silencieuse qui ne souhaite plus laisser son image bafouée par une minorité agitée plutôt qu'agissante".
Ces projets porteront sur "l'éducation, l'accès au logement, à l'emploi et la réappropriation de l'identité nationale". Des projets finalement à mi-chemin du CRIF, pour la voix politique qu'ils pourraient porter, et du Fonds social juif unifié, pour leur coloration sociale.