Un jeune Emirati a été arrêté à la mi-mars 2014, emprisonné et torturé pendant 4 jours pour un simple message de cent et quelques signes, jugé subversif par les autorités.
Agé de 25 ans et ingénieur de formation, Ossama Al-Najjar est le fils de Hussein Al-Najjar, un physicien, membre du groupe de 94 sympathisants islamistes, jugés en 2013 dans un procès à charge émaillé d'irrégularités.
Reconnu coupable d'atteinte à la sécurité de l'Etat, le père a été condamné à 11 années de prison, un verdict emblématique de l'oppression dont souffre tous les opposants ou simples critiques de la monarchie émiratie, paniquée à l'idée que les révoltes des « printemps arabes » ne se propagent sur son sol.
Quelques jours avant son arrestation, le 17 mars, Ossama Al-Najjar avait été piqué au vif par une intervention à la radio de sultan Ben Mohamed Al-Qassemi, le souverain de Sharjah, l'un des sept émirats des EAU. « Les familles des personnes arrêtées ne devraient pas inciter leurs enfants à haïr leur pays », avait tancé le monarque.
Et voici l'objet du crime :
« Votre majesté, nous ne haïssons pas notre pays, mais nous n'oublierons pas l'injustice que l'on nous a faite », avait aussitôt tweeté le jeune impertinent, déjà auteur, sur la plateforme de microblogging, de plusieurs commentaires indignés sur le sort réservé à son père.
Sans nouvelle d'Ossama pendant deux semaines, sa mère et son frère ont finalement été autorisés à le visiter le 31 mars, dans une prison d'Abou Dhabi. Selon l'organisation non gouvernementale de défense des droits de l'homme Al-Karama, qui a recueilli leur témoignage, il est poursuivi pour « offense à l'Etat via Twitter », « incitation à la haine » et « appartenance au mouvement Islah », la branche locale des Frères musulmans, bête noire du pouvoir.
A ses deux visiteurs, Ossama a raconté le calvaire qu'il a enduré aux mains des agents de la sécurité d'Etat, la police politique des EAU : un passage à tabac en règle, à coups de câbles électriques, qui a obligé ses gardiens à le traîner, en sang, jusque dans la clinique de la prison.
Très inquiète pour son état de santé, Al-Karama a saisi le Conseil des droits de l'homme des Nations unies et le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture. Selon l'ONG genevoise, les mauvais traitements sont systématiques dans les prisons émiraties.
Des critiques qui laissent Abou Dhabi de marbre. Dans un courrier transmis aux Nations unies, en novembre 2013, ses dirigeants, qui ont ratifié la Convention internationale contre la torture, affirmaient prendre leurs obligations dans le domaine des droits de l'homme « très au sérieux ».
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/04/09/aux-emirats-quatre-jours-de-torture-pour-un-tweet_4398125_3218.html